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Renouvellement de la Charte de territoire Parc naturel du Morvan : un aveu d’impuissance ?

Communiqué de SOS Forêt Bourgogne

samedi 19 octobre 2019, par Association ARPENT

En mars 2019, l’État et la Région ont adopté le Contrat régional forêt-bois, qui identifie le Morvan comme zone prioritaire pour la production de résineux, et justifie cette orientation par l’arrivée à maturité industrielle des plantations du fonds forestier national (FFN). En réalité, le Contrat forêt-bois comme son nom l’indique assume d’être avant tout un outil de développement économique de la filière avec l’aval du ministère de l’Agriculture.

Dans le Morvan, les orientations du Contrat confortent la filière intensive et son modèle productiviste hérité des années 60 : monocultures ultra mécanisées et récoltées par coupes rases, avec une marge financière sur les volumes et la compression des coûts. On aurait pourtant pu s’inspirer du modèle sylvicole franc-comtois, que le Contrat traite à part et ne remet pas en cause : qualité, innovation, transformation, plus value et emplois locaux.
Dans le même temps, l’État, la Région et les mêmes élus ont travaillé sur le renouvellement de la Charte de Parc naturel du Morvan et l’on validée. Dans ce projet, l’approche de la forêt est à la fois environnementale et économique, avec la double ambition de préserver le patrimoine forestier [1] et de s’orienter vers une gestion multifonctionnelle, qui produise du bois sans porter atteinte aux équilibres naturels actuels et futurs.
Il est bien évident que si l’État et les collectivités publiques ne donnent pas aux instances du Parc les moyens juridiques et financiers d’assurer cette mission, elle restera lettre morte. Les préconisations et autres bonnes intentions ont fait la preuve, depuis 50 ans, de leur inutilité.
Or l’État se refuse à avaliser les deux demandes du Parc qui lui permet- traient d’assumer son rôle de médiation entre préservation de l’environnement et développement économique : apporter un avis consultatif sur les plans de gestion sylvicole, et lutter contre les coupes rases sauvages en abaissant le seuil d’autorisation actuellement de 4 hectares à un demi hectare. La multiplication des coupes rases et transformations au gré des seuls intérêts économiques, détruisent des habitats d’intérêt européen, les continuités, trames et réseaux de forêts anciennes vieillissantes [2].
Nous sommes aujourd’hui à la croisée des chemins :
• soit nous prenons la décision de préserver notre patrimoine naturel et économique - dans le sens : forêt résiliente et sol forestier fertile, ce qui est incompatible avec la sylviculture intensive de court terme,
• soit nous cédons aux sirènes de la (prétendue) compétitivité, véritable puits sans fonds que le pillage de l’ensemble des forêts ne comblera pas, tant il se trouve de part le monde de moins disants socio-environnementaux.
Dans le Morvan, la priorité absolue est de changer le modèle sylvicole, par ailleurs climaticide. Ces monocultures en turnover rapproché détruisent les capacités de la forêt à capter et stocker le carbone, notamment dans les horizons profonds du sol, qui est sont la véritable pompe à carbone de nos forêts.
Le Contrat forêt-bois BFC aurait pu se saisir de l’opportunité de la maturité des peuplements du FFN pour mettre en place un renouvellement en adéquation avec un parc naturel et les enjeux du 21e siècle [3] : diversité en mélange (avec une part minimum d’indigénat), conduite vers un rallongement des cycles, une régénération naturelle ou encore mieux qui tend vers l’irrégulier. Ces méthodes sylvicoles ont fait la preuve de leur pertinence à la fois économique, environnementale, sociale et climatique. C’est d’ailleurs ce qu’a très fortement suggéré l’Autorité environnementale.
Nous demandons à l’Etat d’entendre les préoccupations des élus du Morvan qui s’inquiètent de voir leur territoire être la cible d’une politique irréfléchie, mal évaluée et risquée et d’intérêts privés qui implantent du douglas à la place des forêts de feuillus. Il est urgent d’arrêter le pillage systématique et organisé du Morvan.


[1Est-il besoin de rappeler que les forêts feuillues du Morvan encore existantes sont identifiées réservoir de biodiversité par le SRCE de Bourgogne, et que la plupart ces peuplements anciens préservés sont des habitats d’intérêt européen (dont notamment les 41.11, 41.12 et 41.13) ?

[2Sans parler des incidences eau / milieux aquatiques dans un massif qui est le château d’eau de la région

[3Le Contrat ne localise pas "les forêts où se feront les prélèvements supplémentaires", et de ce fait n’analyse pas les impacts de cette intensification sylvicole. Également, le Contrat ne caractérise pas la multifonctionnalité "en fonction du contexte local" (définir une échelle d’appréciation et des critères clefs de gestion), ce qui ouvre la porte à la spécialisation. Ces deux points étaient pourtant une demande du programme national forêt-bois pour encadrer l’augmentation de la production (et de la productivité : standardisation, mécanisation etc). Le Contrat ne prend pas non plus position sur les méthodes sylvicoles qui favorisent ou réduisent les capacités de la forêt à amortir le choc climatique, malgré une évaluation environnementale très précise sur cette question.

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