Dans leur étude publiée dans la revue scientifique One Earth, des chercheurs appellent à une action climatique « immédiate et colossale » pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, face à la « potentielle menace majeure » posée par ces boucles de rétroaction. Certaines d’entre elles sont en effet associées à ce que les scientifiques appellent des « points de basculement » climatiques, tels que l’effondrement de la calotte glaciaire du Groenland ou de l’Antarctique, qui entraînerait une montée des eaux catastrophique.
« Effrayant »
Pour mieux faire comprendre ce qu’est une boucle de rétroaction, Christopher Wolf, co-auteur de l’étude, dresse une comparaison : lors d’une panique bancaire, les clients retirent en masse leur argent, par peur que leur banque ne s’effondre. Mais ce comportement ne fait qu’augmenter le risque de faillite, poussant encore plus de gens à se rendre aux guichets – et ainsi de suite. Au total, les chercheurs ont dénombré 41 boucles de rétroaction climatiques : 27 positives, c’est-à-dire renforçant le réchauffement de la planète, sept négatives, et sept à l’effet encore incertain.
Certaines sont « effrayantes », a confié à l’AFP William Ripple, également co-auteur de l’étude. Comme le dégel du permafrost (ou pergélisol) en Arctique, qui relâche dans l’atmosphère des gaz à effet de serre jusqu’ici pris dans la glace, notamment du méthane. Ces gaz alimentent ainsi un réchauffement accru, et donc la poursuite du dégel. De la même façon, les incendies, qui se multiplient à cause du changement climatique, rejettent du CO2 aggravant la hausse des températures.
Pour établir cette liste, les chercheurs ont passé en revue toute la littérature scientifique sur le sujet. Certaines boucles de rétroaction ont été découvertes récemment, et d’autres pourraient encore l’être dans un futur proche, note l’étude. Leur intensité peut varier dans le temps, et si certaines peuvent agir sur le très long terme, elles peuvent aussi un jour ou l’autre avoir une fin (le permafrost complètement dégelé, la banquise complètement disparue).
« Si nous pouvons avoir une bien meilleure compréhension des boucles de rétroaction et faire les changements nécessaires (…) nous pourrions encore avoir le temps de limiter les dégâts », explique l’étude. « À l’inverse, si les pires risques posés par les boucles de rétroaction et les points de basculement ont été sous-estimés, le futur d’une planète habitable pourrait être en jeu. »