Ses auteurs constatent d’abord que la préfète des Deux-Sèvres, en édictant, dans un courrier daté du 22 mars, que « les observateurs de la Ligue des droits de l’Homme présents sur les lieux de manifestation » seraient « assimilés à des manifestants » a pris quelques étonnantes libertés avec le droit international en privant de facto les observateurs de la LDH « de la possibilité d’exercer leur mission d’observation ».
Stigmatisation et criminalisation
Le rapport relève ensuite qu’à l’approche de la manifestation de Sainte-Soline, « la communication gouvernementale a consisté à disqualifier le mouvement pour assimiler les manifestant·es à des délinquant·es et même à des terroristes », et que cette manipulation langagière a préparé une « gestion du maintien de l’ordre » proportionnée à cette prétendue menace.
La LDH, citant l’association de critique des médias Acrimed, insiste : l’activisme écologique est devenu « l’épouvantail médiatique du moment », et les actions de désobéissance civile sont désormais présentées comme du « terrorisme à basse intensité ». Un homme, en particulier, a beaucoup contribué, expliquent les auteurs du rapport, à cette extravagante criminalisation : c’est Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur d’Emmanuel Macron et auteur de l’impérissable analyse selon laquelle « des gens (...) veulent, par la violence, par la terreur, et donc par le terrorisme, empêcher l’État de droit de fonctionner ». Puis de cette inévitable conclusion : « N’ayons pas peur des mots. (...) Il y a un certain nombre d’actes qui s’apparentent à de l’écoterrorisme. »
Bien sûr, et comme le rappelle ensuite le rapport, « la qualification d’“éco-terrorisme“ n’existe pas en droit pénal français ». Et le fait de se mobiliser pour l’environnement n’a évidemment rien à voir avec le terrorisme. Mais l’objectif de Gérald Darmanin, lorsqu’il use de ce lexique extravagant, n’est bien sûr pas de se conformer à la réalité factuelle : en criminalisant ainsi les mobilisations écologiques et environnementales, ce ministre manipulateur cherche, comme le relève la LDH - reprenant une analyse du chercheur Alexandre Truc – à « délégitim(er) une action militante en la présentant comme violente tout en justifiant, dans le même temps, l’utilisation », contre les militants et militantes investis dans cette action, « de moyens juridiques et policiers d’une extrême intensité ».
En somme, résument les auteurs du rapport, « en qualifiant d’“éco-terroristes“ des pratiques militantes, le gouvernement stigmatise et criminalise un mouvement social », et construit « un groupe social dont la présence est considérée comme illégitime dans l’espace public », et qui peut dès lors « être réprimé violemment (...) au nom de l’ordre public » lorsqu’il ose prétendre au libre « exercice » de ses « droits ».